Le caractère distinctif de la marque
Les contours de l’obligation de distinctivité
19/05/2025Pour être valablement enregistrée, une marque doit répondre à plusieurs conditions cumulatives, fixées par le Code de la propriété intellectuelle. Le signe déposé doit être :
- Susceptible de représentation ;
- Distinctif et non descriptif ;
- Licite, conforme à l’ordre public et aux bonnes mœurs ;
- Non trompeur quant à la nature, la qualité ou la provenance du produit ou du service ;
- Déposé de bonne foi ;
- Disponible, c’est-à-dire libre de droits antérieurs opposables.
Parmi ces conditions, le caractère distinctif constitue l’un des fondements essentiels de la fonction même de la marque : permettre au consommateur d’identifier l’origine commerciale d’un produit ou d’un service.
I- L’exigence de distinctivité : une condition essentielle à la validité de la marque
La marque est définie par l’article L711-1 du Code de la propriété intellectuelle comme « le signe servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale de ceux d’autres personnes physiques ou morales ».
Une marque servant à distinguer un produit ou un service, le signe composant la marque doit nécessairement être distinctif, c’est-à-dire permettre au consommateur d’identifier l’origine commerciale du produit ou service.
Cette obligation de distinctivité, directement liée à l’absence de caractère descriptif, est imposée par l’article L. 711-2 du Code de la propriété intellectuelle qui prévoit que :
« Ne peuvent être valablement enregistrés et, s'ils sont enregistrés, sont susceptibles d'être déclaré nuls :
1° Un signe qui ne peut constituer une marque au sens de l'article L. 711-1 ;
2° Une marque dépourvue de caractère distinctif ;
3° Une marque composée exclusivement d'éléments ou d'indications pouvant servir à désigner, dans le commerce, une caractéristique du produit ou du service, et notamment l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l'époque de la production du bien ou de la prestation du service ;
4° Une marque composée exclusivement d'éléments ou d'indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce (…) »
En d'autres termes, une marque ne doit pas se limiter à décrire les produits ou services qu'elle désigne. Elle doit posséder un caractère distinctif intrinsèque, permettant au public pertinent de l'associer à une origine commerciale spécifique.
Acquisition du caractère distinctif par l’usage
Il est à noter que, dans certains cas, une marque initialement dépourvue de caractère distinctif peut acquérir ce caractère par l'usage. L'article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle prévoit en effet que « le caractère distinctif d'une marque peut être acquis à la suite de l'usage qui en a été fait ».
Cependant, cette acquisition par l'usage nécessite la démonstration d'un usage intensif et prolongé de la marque, permettant au public de l'associer à une origine commerciale déterminée.
II- L’impact du défaut de distinctivité dans le cadre d’une action en contrefaçon
L’article L. 713-6 du Code de la propriété intellectuelle précise que « une marque ne permet pas à son titulaire d'interdire à un tiers l'usage, dans la vie des affaires, conformément aux usages loyaux du commerce (…) de signes ou d'indications qui sont dépourvus de caractère distinctif ou qui se rapportent à l'espèce, à la qualité, à la quantité, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l'époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d'autres caractéristiques de ceux-ci ».
Ainsi, lorsque des marques sont composées d’éléments descriptifs, « les éléments figuratifs seuls sont aptes à conférer aux signes en présence un caractère distinctif au regard des produits et services concernés ».
(CA Paris, 5 févr. 2021, n° 19/17755)
De manière plus générale, il a pu être jugé que la juxtaposition de termes « purement descriptive de l’activité exploitée (…) ne permet pas une identification de l’entreprise concernée afin de la distinguer des autres entreprises du même secteur », de telle sorte que « le signe invoqué ne constitue pas une antériorité opposable ».
(TGI Paris, 13 novembre 2015, 14/01694)
III- Conclusion : l’importance du choix d’une marque distinctive
Le dépôt d'une marque vise à conférer à son titulaire un monopole d'exploitation sur un signe permettant d'identifier distinctement ses produits ou services. Ce monopole n'est effectif que si le signe choisi présente un caractère distinctif suffisant. À défaut, la marque peut être refusée à l'enregistrement ou annulée, et son titulaire ne pourra s'opposer efficacement à l'usage de signes similaires par des tiers.
Ainsi, sélectionner un signe qui ne soit ni descriptif ni usuel, mais véritablement distinctif, est essentiel. Pour ce faire, il est fortement recommandé de consulter un avocat en propriété intellectuelle avant de procéder au dépôt d'une marque.